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3 000 spectateurs répondent à l'appel d'Amnésie Internationale

Un immense succès pour le rendez-vous biennal marseillais de la mémoire organisé par la Jeunesse Arménienne de France (JAF) et la centaine de bénévoles mobilisés pour l'occasion. Les tables rondes, le village de la mémoire, le café des associations et les concerts de soutien ont composé cette nouvelle édition consacrée à la nécessaire transmission de la mémoire. Un évènement hors du commun pour ranimer la mémoire, un électrochoc pour d'autres. Zebda a fini par embraser un Dock des Suds plein à craquer au bout de la nuit. Retour au cœur de l'évènement à travers le regard d'un spectateur. Magnéto Serge...

 

 

Parce que plus de 10M d’arméniens, de juifs, de rwandais et cambodgiens ont été massacrés en 97 ans. Parce que, n’en déplaise au Conseil Constitutionnel, le négationnisme est un crime. Parce qu’il s’agit d’un évènement culturel unique en son genre. Parce que tout citoyen épris de Justice est concerné par cette cause. Parce que « Je ne savais pas ». Parce que tout Marseille en parlait. Je me suis rendue avec quelques amis au Dock des Suds ce samedi 24 mars.


 

En passant la porte du Dock nous nous retrouvons dans une agora dans laquelle se trouve Le Village de la Mémoire. Un immense espace de vie pour raviverla mémoire et interpeller le visiteur, et où sont projetées des photos des génocides du XXèmesiècle. L’identité visuelle permet d’identifier clairement où nous sommes. Des associations partenaires d’Amnésie : Diversens, CCAF, Survie… sont présentes pour nous faire découvrir et discuter de leurs actions.

 


A quelques pas de là nos regards sont captés par de la couleur, des lumières. Un homme sous un parapluie s'avance vers nous. Il nous regarde et semble être pourtant ailleurs. Sous son parapluie nous entrons dans son monde. Il commence : « L'automobile s'enfonce comme une lame de couteau dans la chair brûlante du désert. À l'intérieur du véhicule, on respire aisément (…) Je cherche des ossements ! Les restes de mes ancêtres. Pendant toute la durée du voyage, je m'efforce de contenir mon émotion, je la dissimule.

 

J'aurais voulu être comme quelqu'un qui revient dans sa maison natale après plusieurs décennies d'absence. Comme des milliers d'autres personnes par le monde. Mais moi j'aspire à quelque chose d'absurde, descendre dans un caveau à même le corps nu de la terre. Revenir dans un désert-cimetière. Ce ne sont pas les souffrances anciennes qui m'attirent ici, non plus que l'envie de souffler sur les braises de la haine (…) Moi, je me souviens. C'est pour cette raison que je suis ici. Pour défaire la toile de l'oubli (…) ». Je ne peux contenir mes larmes. L'homme sous le parapluie s'arrête, je sais désormais pourquoi je suis ici.

 

 

Le regard un peu embué je me retrouve face aumur des vœux. Plusieurs petits messages sont accrochés : « pour la paix », « plus jamais ça », « pour mes ancêtres, je ne vous oublie pas »… Après le témoignage que je viens d'entendre, je ne peux m'empêcher d'avoir envie d'écrire à mon tour un mot. Comme une irrésistible envie de marquer mon passage dans ce lieu unique, le poumon d'Amnésie.

 

15h30, la première table ronde commence : Les enjeux de la transmission. Autour de la table Valérie Haas (Maître de conférences en psychologie sociale à Lyon), Hélène Piralian (Psychanalyste et philosophe), Alban Perrin (Coordinateur de la formation au Mémorial de la Shoah, chargé du cours sur les génocides IEP Bordeaux), Esther Mujawayo (Auteur, sociologue et psychothérapeute), Alain Gauthier (Président du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR)). Encore une fois je ne ressors pas de là indemne. Le devoir de mémoire est nécessaire pour « réanimer les disparus », rétablir un équilibre entre les morts et les vivants pour découvrir son histoire et se construire. « Nous ne devons pas considérer l'autre comme un monstre, un fou, ce qui pourrait justifier son geste », mais avoir conscience que le bourreau est manipulé par des instances supérieures, d'où l'intérêt d'être toujours en éveil.

 

 

17h30, une deuxième table ronde : A la recherche de l'humanité perdue. Composée du Président d'honneur de cette 6ème édition d'Amnésie, Serge Klarsfeld (Avocat, historien et écrivain. Vice-Président de la Fondation du Camp des Milles - Mémoire et Education), William Bourdon (Avocat à la cour et à la Cour pénale internationale), Thierry Cruvellier (Journaliste et écrivain, ancien rédacteur en chef d'International Justice Tribune), Frédéric Nevchehirlian (Artiste, auteur compositeur interprète).
Le débat se veut plus technique, mettant en évidence la nécessité de légiférer pour rétablir la justice et offrir une sépulture morale à toutes ces victimes.

 

 

La soirée avance et la cérémonie d'ouverture avec les enfants de la JAF commence. Tout l'après-midi ils ont circulé, comme nous, au sein du Dock des Suds afin de s'imprégner de l'Histoire, afin de comprendre les mécanismes d'un génocide et les similitudes entre ces différents massacres. La thématique d'Amnésie cette année est la transmission, et interpeller les enfants sur toutes ces dimensions relève de notre devoir citoyen.

 

Malgré la sordidité du sujet, Amnésie est aussi un espace où l'on danse et où l'on chante tous ensemble. Dès 20h30 les premiers concerts commencent. Deux scènes sont prévues pour accueillir des groupes aux sonorités méditerranéennes : Diana di l'Alba, Lou Seriol, Gaïo, MiNor Syndicate, sans oublier la tête d'affiche de la soirée Zebda. Reformés pour un nouvel album des plus engagé Second Tour, ils ont enflammé le Dock des Suds. Leur message est clair, il faut s'engager, militer. Amnésie vibre au rythme des dernières paroles de leur chanson : « Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines ? Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu'on enchaîne ? », nous sommes plus motivés que jamais… contre l'oubli, contre le déni, pour la mémoire et pour la vérité.

 

 

La soirée se termine, ou presque. En sortant du Dock on nous remet à chacun une revue au titre évocateur : Transmettre. Je la feuillette rapidement. Elle se compose d'articles, de témoignages, de photos et d'illustrations. Je retrouve des mots, des noms… qui ont marqués ma journée. Cette revue c'est un peu le prolongement de cette journée, un relais de la mémoire que tous ces bénévoles nous tendent pour continuer à alerter et éveiller les consciences.

 

Retrouvez le programme de cette 6e édition

 

 

 

En exclusivité, la nouveauté de cette 6e édition : la charte d'Amnésie Internationale en langue des signes française.

 

 

Amnésie Internationale pense à tout le monde pour que chacun puisse en profiter. C'est ainsi qu'en exclusivité cette année pour la 6ème édition Diversens a traduit en langue des signes (LSF) la charte lors de la cérémonie d'ouverture et sur le site internet.

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sein de la vie sociale privée ou publique. Pour plus d'informations, www.diversens.fr

 

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